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Q&R avec David Fayon

Photo du rédacteur: Trusted MagazineTrusted Magazine

Dernière mise à jour : il y a 20 heures


Q&R Exclusif de Trusted Magazine avec David Fayon, Auteur, Fondateur de Numérikissimo.



Quels leviers les entreprises peuvent-elles activer pour tirer un avantage concurrentiel durable des avancées en IA générative en 2025 ? 


Avant d’utiliser des IA génératives ou même recourir à l’intelligence artificielle plus globalement, il est primordial de connaître son niveau de maturité numérique puis d’effectuer sa transformation digitale. Il existe la méthode DIMM (Digital Internet Maturity Model) décrite dans le livre La transformation digitale pour tous ! paru chez Pearson et qui, avec 6 leviers (stratégie, organisation, personne, offre, technologie & innovation, environnement) et jusqu’à 115 indicateurs, permet de dresser une photo à un instant donné de la maturité numérique de toute organisation. L’IA générative est une étape intéressante car elle permet d’automatiser certaines tâches consommatrices de données et d’ubériser en partie le travail humain de cols blancs et de redéfinir les missions des collaborateurs. Mais c’est la cerise sur le gâteau. Si on commence par introduire de l’IA générative sans s’interroger sur le système d’information, son architecture, ses flux de données, etc. on risque de passer à côté, de réaliser des investissements coûteux sans récolter des fruits. Aussi, il convient de déterminer les cas d’usage et de précisément étudier l’apport de l’IA générative et à la suite du traitement réalisé s’interroger sur le retraitement humain pour déceler de potentielles erreurs du fait des biais, des hallucinations, d’un non-sens pratique et du caractère probabiliste de l’IA générative. Une solution ne peut être à 100 % effectuée par de l’IA générative. On a toujours besoin d’un pourcentage humain au même titre qu’avec les véhicules autonomes sont induits d’autres métiers humains, de contrôleurs, etc.  


Parmi les cas d’usage de l’IA générative, nous avons : 

  • La relation client avec des chatbots et des assistants virtuels nourris par de l’IA générative pour répondre à des questions courantes comme les tarifs des produits et des services et assurer un SAV de premier niveau 24 h sur 24 ; 

  • La création de contenu textuel avec un gain de temps mais le risque d’un contenu fade, peu créatif et non disruptif existe ; 

  • La génération d’idées marketing (publicités, contenus pour les réseaux sociaux, recherche de mots clés pour le référencement) sans pour autant être en prise avec un buzz lié à l’actualité ; 

  • La création de visuels et de sons avec les IA génératives dédiées ; 

  • La synthèse d’analyses de marché et des analyses de données ; 

  • L’optimisation de processus (stocks, logistique, planification de la production, gestion des plannings et des tâches, etc.) du fait des données historiques passées et des saisonnalités par exemple ; 

  • L’automatisation de tâches répétitives avec génération de scripts associés. 


Et des questions sont par ailleurs à se poser : 

  1. Est-ce que mes concurrents, clients, fournisseurs utilisent des solutions à base d’IA générative et pour quoi faire ? 

  2. Est-ce que mes collaborateurs sont formés aux outils, connaissent les risques et notamment par rapport à la confidentialité de certaines données de l’entreprise ? 

  3. Quels sont les cas d’usage ? Et pour chacun d’eux quels sont les outils les plus appropriés (LLM, etc.) et quelles seraient les alternatives sans IA génératives ? Il s’agit d’avoir aussi une vision des coûts, des bénéfices et des risques ? 

  4. Après utilisation d’une IA générative, faire un retour des gains apportés, des problèmes éventuellement rencontrés et des solutions mises en œuvre le cas échéant. 


En 2025, nous aurons une plus grande maturité dans l’usage des IA génératives et la recherche de solutions moins consommatrices de données et d’énergie pour un résultat voisin sera appréciée. 



Face à la rivalité croissante entre les États-Unis et la Chine dans le domaine du numérique, quelles opportunités stratégiques s’offrent aux entreprises européennes ? 


Nous sommes plus dans une posture défensive et d’observateur soumis face aux deux géants du numérique que sont les États-Unis et la Chine. C’est triste mais c’est un fait. Nous sommes devenus une colonie américano-chinoise. La maîtrise de la chaîne de valeur (matériel, systèmes d’exploitation et logiciels, données, IA générative) n’est pas assurée. Nous ne disposons que de quelques morceaux et de petite taille. Dans le cloud, nous avons OVH alors que les Etats-Unis disposent d’AWS, de Google Cloud, de Microsoft Azure et la Chine d’Alibaba Cloud. Pire encore, nos données de santé ne sont pas hébergées chez nous mais via des solutions de Microsoft. 


En Europe nous avons des acteurs qui pèsent peu face aux GAFAM et aux BATHX et à tout leur écosystème autour. Quand on voit les capitalisations boursières, en Europe nous avons des acteurs de petites tailles à côté alors que les États-Unis ont des kilocornes, des licornes dont la valorisation est 1 000 fois supérieure. 


Il n’est pas inutile de rappeler l’adage « Les États-Unis innovent, les Chinois copient – mais ils innovent aussi et de plus en plus –, les Européens régulent et les Français taxent ! ». 


Dans ce contexte difficile où par ailleurs nous ne disposons que peu de matières premières (par exemple terres rares) contrairement aux États-Unis et à la Chine et leurs zones d’influence, il convient de choisir ses combats et de voir là où l’on peut disposer d’un maigre avantage compétitif plutôt que de tenter de rattraper notre retard alors que notre capacité d’investissement est limitée et que notre dette pèse sur notre économie comme l’épée de Damoclès. Il faudrait que soient privilégiés dans les financements souvent via Bpifrance, la technologie pure avec les deeptech, la R&D, les domaines où la France peut avoir des avantages compétitifs comme l’informatique quantique. Ensuite il serait nécessaire d’avoir un terreau fertile avec moins de normes, de contraintes, d’avoir une culture de lobbying pour choisir nos solutions ou de l’open source par exemple. 


À cet effet, avoir une commande publique en Europe d’abord tournée vers des solutions européennes est nécessaire. Les Américains et les Chinois mènent des politiques protectionnistes parfois déguisées et nous, naïfs, nous continuons à croire que les règles sont les mêmes pour tous. C’est la prise de conscience du soft power et de l’intelligence économique qu’il convient d’inculquer à nos dirigeants. Ceci commence sur les bancs de l’école avec l’utilisation de solutions européennes pour créer des habitudes d’usage qui seront réplicables une fois l’entrée en entreprise. 


On peut aussi miser sur la transition énergétique qui est de prime abord une contrainte mais si elle s’appuie sur l’énergie nucléaire, la R&D côté fusion nucléaire, etc. pourrait devenir un avantage. Pour cela, la recherche fondamentale, la logique du temps long seraient des alliés, ce qui suppose d’avoir une vision. On n’a peu de capitaines d’industrie en France sauf dans le luxe. L’exception reste par exemple Xavier Niel. Il est par ailleurs difficile de construire des acteurs européens même si au niveau aérien ou spatial, cela a été possible avec Airbus et Ariane et encore pour le premier cité, il ne s’agit que de 4 nations européennes (France, Allemagne, Royaume-Uni qui ne fait plus partie de l’UE, Espagne) et non 27. Pour des géants du numérique européen, les entrepreneurs français qui subissent des contraintes de toutes parts, devront avoir de solides convictions et s’allier avec des partenaires européens et au-delà présentant des complémentarités intéressantes pour le projet. Une autre condition de la réussite sera de faire vite et de penser mondialement sans commettre les erreurs de Viadeo ou de Dailymotion face à LinkedIn et YouTube respectivement. Les opportunités sont maigres mais elles existent. C’est tout l’enjeu de cette 3e voie européenne, qui ne doit pas tomber dans les travers de cybersurveillance à la chinoise ou de restriction des libertés et d’une certaine éthique notamment s’agissant des données personnelles. 



Comment concilier innovation rapide en IA générative et gestion des risques éthiques, tout en maintenant la confiance des parties prenantes ? 


Je pense qu’il convient de dissocier la fin, l’innovation rapide, et les moyens, l’IA générative. Les risques éthiques de l’IA générative sont ceux que je mentionnais en réponse à la première question : les biais auxquels il convient d’ajouter les discriminations possibles via les modèles d’IA et qui dépendent des données d’entraînement (par exemple sous-représentation des femmes, des seniors ou de minorités ethniques par exemple). Nous avons au-delà des hallucinations le risque de contenus faux qui peuvent induire des désinformations voire des manipulations. Nous pourrions ajouter que du fait de leur design, les IA génératives et en particulier les LLM gomment certains signaux faibles intéressants et nous assistons à une moyenne de la réponse fournie au script. Ceci chasse ce qui ne rentrerait pas dans la doxa. 


Par ailleurs, il existe des atteintes au secret industriel via des données sensibles des entreprises récupérées par les modèles d’IA génératives qui vont se nourrir d’Internet, des récupérations de données personnelles également. Nous avons aussi des atteintes à la propriété intellectuelle avec ce qui est créé par l’IA générative, les droits d’auteur ne sont pas respectés et même si une réponse fournie par une IA générative est sourcée, les références sont grossières et donnent simplement l’URL de la page d’accueil d’un site et non la page précise en question au sein du site. Enfin toute décision prise par une IA générative devrait avoir un retraitement humain car il existe une opacité des algorithmes qui restent des boîtes noires probabilistes. 


Quant à l’innovation rapide, chaque acteur économique n’a pas un égal accès. Dans certains pays comme l’Inde, le Vietnam, nous avons souvent une plus grande frugalité pour construire une solution, c’est l’innovation Jugaad ou low cost. L’innovation rapide peut s’affranchir d’opérations de contrôle, de sécurité notamment quant aux données utilisées et leur confidentialité. Souvent la rapidité ne va pas de pair avec la qualité ou le respect de certains processus. Pour être le premier, parfois l’éthique passe au second plan ou n’est pas la priorité. Innovation et éthique peuvent s’opposer. Pour autant si on veut innover rapidement en utilisant des IA génératives, il convient d’avoir des garde-fous et d’être conscient des limites des IA génératives. 

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