Q&R Exclusif de Trusted Magazine avec Meriem SKIK, Formatrice & Consultante.
Comment l’environnement des affaires en 2025 impacte-t-il la gestion de projets ?
L’environnement des affaires est aujourd’hui marqué par différentes tendances majeures induites par la transformation numérique à travers notamment les opportunités offertes par l’Intelligence Artificielle, la croissance exponentielle du travail à distance et des équipes distribuées, ainsi que les nouveaux enjeux géopolitiques.
La transition écologique représente également un défi majeur imposant aux chefs de projets d’adopter une approche éthique, responsable et transparente. De nouvelles règlementations et exigences des bailleurs de fonds en termes de reporting ESG (Environnemental, Social et de Gouvernance) sont désormais imposées aux entreprises. Elles émanent notamment de la GRI (Global Reporting Initiative) et de l’Union Européenne à travers la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) visant l’harmonisation du reporting ESG en Europe.
S’ajoute à cela un contexte VUCA, particulièrement instable et imprévisible, poussant les managers et les chefs de projets à réinventer leur rôle et à faire preuve d’adaptabilité et d’une grande résilience pour faire face à un environnement complexe, dont les contours deviennent difficiles à anticiper.
Les modèles traditionnels de management de projets basés sur des structures rigides et hiérarchiques deviennent désuets dans un contexte de forte volatilité et de concurrence accrue. Gestion Top/Down, silotage des équipes, livraison tardive de valeur au client, plans figés entrainant une rigidité et une difficulté à gérer les changements, sont autant de pratiques que les chefs de projets doivent repenser pour naviguer efficacement dans un paysage évolutif et incertain et se frayer un chemin dans la complexité.
Quelles étaient les lignes directrices du PMBOK (Project Management Body Of Knowledge) dans sa version 7 ?
Pour rappel, la première version du PMBOK est apparue en 1996, suivie, tous les 4 ans en moyenne, par une nouvelle version apportant des changements incrémentaux par rapport aux précédentes mais avec une ligne directrice commune, méthodique et structurée. Les six premières éditions orientées processus avaient été révolutionnées en 2021, avec l'apparition d'une version 7 à la philosophie radicalement différente, basée sur des principes universels et brossant le portrait du mindset que devraient partager les certifiés PMP.
Parmi les principes sous-jacents à la version 7, un focus particulier avait été mis sur quatre éléments essentiels : la création de valeur pour le client, l'adaptation des approches, des outils et des modèles aux particularités de chaque projet, la gestion de la complexité et la place privilégiée accordée à l'humain.
L'état d'esprit agile avec ses valeurs et ses principes incarnés par le manifeste agile de 2001, y était également largement présent. Une manière supplémentaire de mettre l'accent sur l’importance de la flexibilité, de l'adaptabilité et de la résilience dans un environnement VUCA ; mais également sur la nécessité de mettre l'Homme au centre de ses préoccupations.
L'aspect humain transparaît beaucoup à travers la place privilégiée qu'occupe l'équipe de réalisation avec qui il est recommandé d'adopter un style de management bienveillant de nature à offrir un environnement de travail collaboratif et stimulant, renforcé par la présence d'un leader-serviteur.
La version 7 a également eu l’originalité de présenter des modèles très utiles dans un contexte d’incertitude tels que les modèle de Stacey et de Cynefin, ainsi que des modèles emblématiques de conduite du changement à l’instar du modèle ADKAR et de celui de Jhon Kotter.
Comment la huitième version du PMBOK propose t-elle de gérer les opportunités et menaces de l’environnement actuel ?
A l'aune d'une version 7 axée sur l’agilité, l’adaptabilité et la flexibilité et prônant un servant leadership bienveillant, un retour vers une conception plus rigide semblait tout à fait improbable...
Alors même que la huitième version est en phase de finalisation pour une publication prévue au cours du troisième ou du quatrième trimestre 2025, le draft publié par le PMI a suscité la curiosité de la grande communauté du PMP, et pour cause…
Dans cette nouvelle version, le PMI semble proposer un ingénieux mélange entre les principes initiés par la version 7 et l’approche processus des versions précédentes.
Six principes y sont ainsi définis, offrant des réponses appropriées aux réalités de l’environnement actuel en prônant une vision holistique du projet, une concentration accrue sur la valeur livrée aux clients, la qualité des processus et des livrables, le steawardship et le management par la bienveillance, ainsi que l’intégration des aspects liés à la durabilité et à la responsabilité sociale dans tous les aspects du projet.
Des domaines clés de performance du projet y sont également détaillés sous forme de processus et de ITTO (Inputs, Tools & Techniques, Output). Il s’agit de la gouvernance du projet, de la gestion du périmètre, de l’échéancier, des finances, des parties prenantes, des ressources et des risques.
Un exposé détaillé des cycles de vie itératifs, incrémentaux et agiles y est également proposé, mettant ainsi davantage l’accent sur les approches les plus adaptées à un contexte VUCA.
L’Intelligence Artificielle fait également son entrée dans le PMBOK qui expose l’intérêt de ces outils technologiques dans l’optimisation des ressources, de l’échéancier, des coûts et pour une meilleure gestion des risques.
Bref, une une nouvelle version tournée vers l’avenir, qui modernise les pratiques tout en consolidant les fondamentaux ! Un PMBOK 8 avec des racines et des ailes…