Partout dans le monde, l’épidémie de coronavirus bouleverse notre quotidien. Fin mars, plus de 3,38 milliards de personnes, soit 43 % de la population mondiale, étaient confinées chez elles (1). Au fil des jours, l’impact de la crise économique liée à la pandémie de covid-19 se fait de plus en plus sentir. Aux oubliettes l’achat de sacs de grands créateurs et du dernier modèle SUV. Suite aux directives gouvernementales limitant les déplacements, les consommateurs ont revu leur sens des priorités.
Le consommateur est fortement influencé par l’environnement dans lequel il évolue. La crise que nous connaissons aujourd’hui s’est traduite par une importante modification de comportement du consommateur marocain. En effet, La consommation de plusieurs catégories de produits et services connaît aujourd’hui un véritable recul (c’est le cas de l’hôtellerie, des voyages, des loisirs…).
Inversement, d’autres produits ou services ont le vent en poupe, comme les produits d’entretien (gels hydro alcooliques, masques, gants de protection…), en passant par les produits de premières nécessité (huile, farine, lait…), ou encore le domaine du divertissement avec les plateformes de streaming et de VOD. D’autres secteurs comme le luxe, l’habillement, les cosmétiques ou l’automobile ont également connu un grand désintérêt des consommateurs. Toutes ces activités non-essentielles ont eu l’obligation de fermer leurs magasins, portant un gros coup à l’activité du secteur. Les enseignes n’ont pas d’autre choix que de compter massivement sur leurs services de e-commerce et sur la livraison pour limiter les dégâts, mais les résultats restent inégaux selon le type de produit ou service vendu.
Déplacements limités, les ménages stockent dans leurs placards
Dans la foulée, la tendance à utiliser les "fonds de placards", tant pour limiter le gaspillage que par flemme d'aller faire les courses, s'est également intensifiée. Cela s’explique par un mécanisme de protection qu’est l’instinct de survie, comportement naturel d’un individu se souciant d’un lendemain incertain. Fort heureusement, Les choses se sont apaisées au fil du temps grâce aux messages rassurants du gouvernement et des principaux acteurs économiques du royaume.
On pourrait aussi observer un changement au niveau de l’indice des prix à la consommation qui a connu une hausse au cours du mois de mars 2020 de 0,4% par rapport au mois précédent. Cette variation est le résultat de la hausse de 1,3% de l’indice des produits alimentaires et de la baisse de 0,2% de l’indice des produits non alimentaires. Les hausses des produits alimentaires observées entre février et mars 2020 concernent principalement les « légumes » avec 6,3%, les « poissons et fruits de mer » avec 1,9%, les « fruits » avec 1,7%, les « huiles et graisses » et le « lait, fromage et œufs » avec 0,4%, les « viandes » avec 0,3% et les « boissons non alcoolisées » avec 0,2%(2).
Pour les produits non alimentaires, la baisse a concerné principalement les prix des « carburants » avec 6,8%, dû un recul important du prix du pétrole brut américain passant dans le négatif pour la première fois de son histoire. Le prix du baril de brut américain de référence, le West Texas Intermediate (WTI), a terminé à -37 dollars le 20 avril 2020, du jamais vu, entre des réserves mondiales qui arrivent à saturation et une demande anéantie par la pandémie de covid-19.
Transformation digitale à marche forcée, Aubaine pour les entreprises ?
Au-delà des impacts négatifs immédiats sur l’économie, si on se force à prendre un peu de recul, la crise actuelle, entre autres choses, a eu pour effet de faire décoller le e-commerce de manière systématique et brutale. Il semblerait bien que la situation ait changé du tout au tout en trois semaines à peine. Aussi étrange que cela puisse paraître, c’est un virus qui a mis un coup de pouce à cette transformation managériale, stratégique et technologique qui traînait depuis si longtemps. En effet, Plusieurs enseignes ont ainsi développé très rapidement leurs services, adoptant pour certaines de nouvelles solutions comme la livraison à domicile ou encore le paiement sans contact. Il est probable que parmi les nouveaux adeptes de la livraison, nombre de consommateurs gardent ces nouvelles habitudes même après la fin du confinement, marquant une entrée plus décisive dans le e-commerce pour ce secteur.
Mais le chemin est encore long pour une myriade d’entreprises qui sont toujours sceptiques à l’idée d’opérer à une réelle transformation digitale et ainsi suivre les tendances imposées par leurs concurrents. Dans tous les cas, les entreprises devront faire preuve de résilience et revoir leurs modèles économiques s’ils elle veulent rester dans la course. Elles devraient aussi se préparer à l’après-crise et faire face à de nouveaux comportements d’achat et de consommation. Par ailleurs, Cette crise devrait encourager et accélérer la transformation numérique des entreprises marocaines. En effet, le digital ne sera plus vu comme un simple effet de mode mais plutôt comme un moyen de survie et de compétitivité.
Parallèlement, Cette période de confinement pourrait être une période de réflexion, d’introspection et d’autocritique. On pourrait constater, après la crise, des comportements d’achat plus raisonnés, responsables et orientés vers l’essentiel et pourquoi pas un retour vers le minimalisme, exit le consumérisme déraisonné.
Par Yasmine Zemrani, Entrepreneur, Analyste-chercheur en Marketing
1- Source : base de données AFP, 29 mars 2020
2- Source : HCP, mars 2020
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